Death Stranding Director’s Cut : Le test PS5

Death Stranding Director’s Cut

Pour être tout à fait honnête, je n’étais pas sûre en abordant cette version Director’s Cut d’être prête à relancer l’aventure Death Stranding. Pas que je ne l’ai pas aimée, c’est même tout à fait le contraire, mais je fais partie de celles et ceux qui ont été particulièrement réceptifs à ce que monsieur Hideo Kojima a voulu transmettre avec cette œuvre vidéoludique. La fin du jeu a réussi à me bouleverser, pas autant que The Last of Us 2, mais tout de même assez pour que j’ai besoin de digérer l’expérience avant d’être en mesure de la revivre.

Finalement, une fois la manette PS5 en main et la première cinématique passée, « l’effet Death Stranding » a refait son apparition : difficile de décrocher, d’autant plus qu’un vaste programme fait de nouveautés semblait s’ouvrir à moi.

Commençons par un point rapide sur la technique. Death Stranding bénéficie évidemment des avantages de la PS5. Le SSD d’abord, qui réduit drastiquement les temps de chargement. Les graphismes ensuite, tout possesseur d’un téléviseur 4K va particulièrement se régaler. Et enfin les 60 fps qui ne bougent pas d’un iota tout au long de l’expérience.

Passons aux ajouts dans les mécaniques, nombreux et faisant partiellement écho à ce que certains pouvaient reprocher au jeu. Tout d’abord, la nouvelle proposition intitulée « stand de tir » qui permet de s’entraîner au combat contre une certaine catégorie d’humains, sans risque, afin d’appréhender quelques nouveauté de ce côté, notamment des armes et ennemis inédits. Ensuite le « circuit Fragile » qui introduit de la compétitivité avec des défis à relever et un classement sur certaines épreuves.

Enfin, cette mouture Director’s Cut intègre plusieurs éléments qui facilitent la progression, tels qu’un nouveau stabilisateur pour la « marche », la catapulte à marchandises, un nouveau robot qui transporte quelques colis à livrer.

Du côté des autres nouveautés, des ost viennent étoffer une liste déjà qualitative, les missions exclusives à la version PC sont de la partie, tandis que d’autres s’ajoutent à cet opus sur PS5. On y pratique essentiellement de l’infiltration – la touche Hideo Kojima – et c’est assez bien fait pour que ces séquences arrivent bien trop vite à leur terme.

Pour conclure, je vais apporter une réponse à la question qui vous brûle les lèvres : est-il valable ou non de (re)passer à la caisse pour cette édition Director’s Cut ? Comme pour l’opus original, cela dépend de ce que vous venez y chercher. Si vous n’avez encore jamais arpenté le monde de Death Stranding et que vous êtes rebuté par les fameuses missions « fedex », les nouveautés peuvent alléger votre peine. A mon sens, c’est dommage, car s’il y a bien un point qui est parfaitement réussi, c’est celui du ressenti du poids – au sens propre comme au figuré – qui pèse sur les épaules de Sam, toute la difficulté des missions qui lui incombent. Quant à ceux qui connaissent déjà le jeu, qui voudraient revivre l’expérience et profiter des nouveautés, il va sans dire qu’il n’y a pas d’hésitation à avoir, d’autant plus que la plupart des ajouts de contenu et gameplay sont facultatifs, vous pouvez ainsi personnaliser votre aventure comme bon vous semble. Enfin, quelques mots à ceux qui ont commencé Death Stranding lors de sa sortie et abandonné en cours de route parce qu’ils n’ont pas aimé, je doute fort que cette version soit en mesure de vous convaincre plus que l’originale. Pour reprendre partiellement la conclusion de mon test sur PS4, je dirais ceci : « On en revient au postulat de départ, à savoir qu’un titre comme celui-ci, plus encore que bien d’autres, n’est rien de plus qu’une affaire entre le jeu et celui qui l’expérimente. On peut lui reprocher tout et son contraire, apprécier, voir adorer certains aspects qui seront détestés par d’autres… La seule certitude inébranlable que nous ayons, c’est que s’il y a bien un jeu qui ne peut pas faire l’unanimité – mais objectivement, lequel en est capable ? – c’est Death Stranding. Ceux qui sauront accepter de sortir de leur zone de confort et de lâcher prise pourront l’apprécier de la meilleure manière possible ».

Le test d’origine sur PS4

Death Stranding. Des mois durant, la seule évocation de ce titre a suscité des réactions empreintes de curiosité, de scepticisme, d’impatience, ou encore d’animosité, allant du plus doux au plus abrupte des commentaires laissés sur les forums et réseaux sociaux. En effet, un titre d’Hideo Kojima qui s’annonce, c’est un évènement toujours assorti de ressentis très variés, qui font rarement dans la demi-mesure. Il faut dire que le père de la série Metal Gear a pour habitude de bousculer la sphère vidéoludique, en proposant des contenus qu’il souhaite novateurs, et inévitablement, les propositions qui font sortir les joueurs de leur zone de confort peuvent se voir décriées ou à l’opposé encensées, les uns hurlant au scandale, les autres criant au génie. L’approche de la sortie de Death Stranding n’a pas calmé les ardeurs, bien au contraire : ce ne sont pas les bribes d’infos, assorties de la vidéo de gameplay d’une vingtaine de minutes mise en ligne peu de temps avant son arrivée, qui ont su mettre fin à des mois de crêpage de chignon virtuel. L’effet fut même inverse, chacun maniant l’art de la rhétorique de manière plus ou moins profonde, soit pour laisser le bénéfice du doute à Death Stranding – après tout, on est innocent tant qu’on n’a pas pu prouver qu’on est coupable – soit pour littéralement descendre le jeu, affublé de divers noms d’oiseaux ou victime de quolibets. Une chose est sûre, toute cette polémique sur un jeu qui n’était même pas encore sorti a eu le mérite de faire en sorte que je m’y intéresse plus que jamais. Que voulez-vous, on ne se refait pas, j’ai toujours eu du mal à supporter les étiquettes, qui plus est celles qui sont si facilement distribuées. Je me trouvais alors avec une furieuse envie de vérifier tout ça par moi-même.

Je l’admets, j’ai lancé Death Stranding avec deux idées en tête, d’une part qu’il était possible que les fameuses étiquettes mentionnées plus avant soient justifiées et d’autre part qu’une expérience de jeu reste très personnelle : il n’y a aucune vérité universelle en la matière. C’est ainsi que j’ai abordé le titre, Dualshock en main, casque branché sur le jack de la manette, prête à en découdre avec les idées préconçues, mais aussi prête à accepter une potentielle incompatibilité entre le titre et moi. Tout est là, Death Stranding est une affaire entre vous et lui et uniquement cela. Gardez à l’esprit qu’un titre comme celui-ci reste une aventure propre à chacun qui ne peut pas être consensuelle, ce n’est d’ailleurs pas le but recherché par son créateur. Si ça avait été le cas, il serait resté dans le sentier balisé des productions triple A, sans prendre de risque aucun, et une chose est sûre, Death Stranding est bel et bien hors des clous.

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La première heure dans Death Stranding

Les débuts dans Death Stranding peuvent être quelque peu déstabilisants. Aucune remise en cause possible de la qualité de cette longue cinématique qui va mettre en place le contexte, elle en met plein la vue, impressionne, autant par son contenu que par la prouesse technique qu’elle représente. Ce qui va causer perturbation, se situe dans ce sentiment d’être largué, de recevoir une multitude d’informations qui ne prennent pas (encore) sens, de n’en saisir que des bribes. La première heure va être plus particulièrement complexe, mais elle ne sera pas pour autant la seule à l’être, le départ dans l’aventure se révèle tout aussi… déstabilisant.

Nous incarnons Sam Porter, un homme qui évolue dans un monde dévasté par le Death Stranding, un monde dont il ne reste pratiquement rien, en dehors de quelques femmes et hommes qui vivent terrés et isolés dans des structures disséminées sur des terres vides et hostiles. L’humanité se cache ainsi des échoués, des âmes tout aussi hostiles que les terres qu’elles arpentent, surgissant n’importe où afin de prendre les vivants pour les mener vers une destination inconnue. Pour compliquer le tout, des précipitations accélèrent le vieillissement de ce qui entre en contact avec elles. Sam est un des rares hommes à passer la majorité de son temps à l’extérieur afin de livrer des éléments indispensables au développement de la population qui vit au sein de ces structures. Notre protagoniste va hériter d’une mission primordiale en parallèle de ses livraisons, qui consiste à relier toutes les zones dans lesquelles vivent ces groupes d’humains via un réseau virtuel, afin de rompre l’isolement et tenter de reconstruire ce qui a été détruit.

Death Stranding a été volontairement conçu pour vous faire ressentir le poids de la solitude et la désolation lorsque vous débarquez dans son monde, à aucun moment vous n’êtes pris par la main pour appréhender les mécaniques du jeu, vous devez apprendre sur le tas, en expérimentant par vous-même. Vous aurez forcément de grands instants de dépit, d’incompréhension face à cette interface si indispensable et pour autant si peu intuitive. Tout au long de votre expérience, vous aurez de grands moments de solitude, ne sachant plus très bien quoi faire, ni comment. Comment monter une structure ? Comment l’améliorer ? Et j’en passe. Quand vous aurez enfin saisi ce que qu’on attend de vous et la manière de le réaliser, un nouvel élément va venir se greffer au gameplay et relancer la machine à questions qui va remplacer, le temps de votre session de jeu, une partie de votre cerveau. Peut-être allez -vous être surpris à la lecture de ces dernières lignes, car vous avez certainement lu ou entendu que Death stranding est un banal walking simulator bien vide, ou encore un jeu sponsorisé par je ne sais quelle entreprise spécialisée dans le transport de marchandises. Certes, vous passerez beaucoup, beaucoup de temps à arpenter le vaste monde de Sam, notre protagoniste, afin de livrer différents colis à leurs destinataires, avec pour effet collatéral de réaliser du level up, gagner en réputation et améliorer dans le même temps vos capacités de livreur. Certes, il y a bien un aspect répétitif là dedans. Mais d’une part, chaque livraison réussie – du moins pour celles faisant partie de la trame principale – va vous octroyer la possibilité de fabriquer ou obtenir un nouvel équipement, objet ou structure utile, voir très utile, et d’autre part, vos longs trajets seront bien souvent ponctués de moments où votre progression sera particulièrement difficile, où vous lutterez contre une topographie qui vous fera chuter, glisser, perdre l’équilibre ou pire, vos précieuses marchandises, vous obligeant ainsi à user vos chaussures sur quelques kilomètres supplémentaires afin de les récupérer, si elles ne sont pas totalement détruites. Ces moments particulièrement décourageants – ou rageants – font partie intégrante à la fois des aspects qui peuvent vous faire maudire ce jeu, à la fois de ceux qui, pour une raison qui dépasse l’entendement, vous impliquent et vous donnent toujours plus l’envie d’y retourner. Est-ce dû au souci du réalisme souhaité par Kojima ? Cette lutte incessante avec les touches de votre manette pour rééquilibrer Sam et sa tour de paquets, à droite, à gauche, le faire stopper, courir ? Cette sensation de ressentir ses difficultés à avancer, de ressentir chaque pierre, chaque obstacle, chaque côte à monter ou pente à dévaler sans tomber ?

Quand on parle d’user ses chaussures, ce sera réellement le cas, elles disposent d’une jauge qui se vide au fur et à mesure des pérégrinations de son propriétaire, l’obligeant ainsi à prévoir une paire de rechange si il ne veut pas se retrouver à littéralement se saigner les pieds sur le sol. Dans le même esprit, Sam va pouvoir disposer de plusieurs engins qui utilisent de l’énergie pour fonctionner et une fois leur batterie vide, vous n’aurez pas d’autre choix que de les abandonner, si vous n’avez pas eu la chance de croiser une structure qui permet de recharger tout ce petit monde. Ce qui vous fera pousser un long soupir de soulagement va s’avérer finalement moins indispensable qu’il n’y paraît de prime abord. La moto – pour ne pas la citer – dispose d’une maniabilité à faire péter les plombs aux plus patients d’entre nous et s’avère peu adaptée à la configuration des lieux. Un autre véhicule – à quatre roues celui-là – va être plus agréable à prendre en main, mais quoi qu’il en soit, vous pourrez peut-être osciller continuellement entre l’envie de vous faciliter la tâche et celle de vivre l’aventure de la manière la moins accueillante qui soit. Étrange non ? Le titre est de toute manière fait pour vous pousser à vous passer des engins, parfois même à renoncer à un certain confort afin de profiter des environnements vastes, sublimes et des musiques qui viennent ponctuer un silence vous rappelant l’ampleur de votre isolement.

Après l’effort, le réconfort

C’est une des forces de Death Stranding : vous balloter continuellement entre différents ressentis, vous pousser dans vos retranchements, vous donner les moyens de progresser plus facilement et vous faire regretter que ce soit le cas – si c’est trop simple, il y a moins de plaisir – pour mieux vous imposer une nouvelle difficulté, un nouvel élément, une nouvelle condition météo, qui va encore vous malmener, vous perdre… et vous faire regretter d’avoir pensé cinq minutes auparavant que c’était devenu plus facile. Death Stranding c’est aussi une aventure qui distille ses points d’intérêt, ses éléments indispensables, ses rebondissements, d’une manière qui s’imbrique parfaitement aux missions de livraison et aux temps libres de Sam.

La majorité des heures passées aux commandes, vous serez seul, ou presque, puisque votre BB va vous accompagner. Je vous passe les détails du pourquoi et du comment vous en êtes arrivé à porter ce petit être dans sa capsule, afin de vous éviter de connaître des éléments de l’histoire qu’il me semble important de découvrir par vous-même, ni le parcours du dit BB, ni… bref, il s’agit là de tout un aspect du scénario qui mérite de ne pas être dévoilé. A l’identique, je fais le choix de ne pas développer tout le système d’entraide qui est mis en place au fil du jeu, par le biais d’interactions asynchrones avec les autres joueurs, ni l’influence que tout ceci peut avoir sur votre expérience de jeu. Je choisis également de ne pas en dire plus sur de nombreux aspects qui, à mon sens, font partie intégrante de la découverte et dont la mention ici viendrait vous priver d’un pan primordial pour apprécier le titre comme il se doit.

Quelques mots sur une autre partie du gameplay qu’il est impossible de ne pas mentionner : les rencontres avec les échoués et les combats, que ce soit contre des adversaires de moindre envergure ou des boss plus charismatiques. Sans trop en dévoiler, vous affrontez deux types d’ennemis, les hommes et les créatures susmentionnées. La vidéo ci-dessous vous donne un aperçu (sans spoiler) de ce en quoi consistent les joutes contre vos semblables. Rien de bien compliqué, c’est assez restreint et la plupart du temps nous laisse même sur notre faim.

Un peu de baston ?

En revanche, croiser des échoués est nettement plus oppressant. Une nouvelle fois, je préfère ne pas trop en dire. Il est simplement utile de noter que, quel que soit votre ennemi, humain ou créature, sous-fifre ou boss, vous ressentirez des difficultés à vous déplacer et à agir similaires à celles rencontrées lors de vos déplacements à travers votre environnement. Cet aspect du jeu va sans aucun doute déplaire à une partie des joueurs. La latence, la lenteur et la redondance des combats peuvent créer un sentiment de trop peu, les attentes des uns en la matière n’étant pas comblées, pouvant même engendrer une sensation de pénibilité désagréable. Je me suis posé la question du but recherché, il n’était pas envisageable que ce soit dû à des lacunes techniques ou un manque de compétence, au regard de ce que l’équipe de développement a réussi à faire, il était impossible que ce soit cela, alors pourquoi ? J’en ai conclu que c’était tout simplement cohérent avec le réalisme recherché. Sam est un gars qui crapahute du mieux qu’il peut, qui progresse avec difficulté, chute, perd l’équilibre, un être humain normalement constitué. Il est logique que cette difficulté se ressente lors des affrontements, à fortiori avec 150 kilos d’objets à livrer sur le dos. C’est pénible mais cohérent avec l’ensemble de l’expérience. Déstabilisant, agaçant, mais cohérent. Et finalement on en redemande.

Je me garderai bien d’affubler Death Stranding d’une quelconque étiquette, de placer un quelconque curseur quelque part et j’admets avoir longtemps tergiversé sur la pertinence de lui attribuer une note. On en revient au postulat de départ, à savoir qu’un titre comme celui-ci, plus encore que bien d’autres, n’est rien de plus qu’une affaire entre le jeu et celui qui l’expérimente. On peut lui reprocher tout et son contraire, apprécier, voir adorer certains aspects qui seront détestés par d’autres. Death Stranding demande de l’attention, du temps, de parfois ne pas se formaliser si on ne saisit pas dans le détail certaines des tirades qui ponctuent nos pérégrinations. D’ailleurs, le flou qui recouvre nos débuts dans ce monde désabusé et sombre va laisser place à plus de clarté. Le temps passant, il devient évident que celui qui ce serait arrêté à une poignée d’heures de jeu garderait une image biaisée de ce qu’est l’histoire de Death Stranding. Le titre demande de la persévérance, de l’acceptation. Impossible de l’apprécier sans adhérer, ou à minima tolérer les partis-pris de son créateur, sans accepter d’être à la fois livré à soi-même, à la fois assommé par ces PNJ qui nous répètent un peu trop ce qui est attendu. Je pourrais continuer encore et encore à lister tout ce qui constitue Death Stranding, exposer comment, même quand on se trouve captivé par le titre, on peut alterner des moments réjouissants qui vont nous faire admirer l’intelligence de l’écriture et la richesse des propositions, à des instants où la seule envie que l’on ait est de poser la manette et de maudire Hideo Kojima jusqu’à la fin des temps. La seule certitude inébranlable que nous ayons, c’est que s’il y a bien un jeu qui ne peut pas faire l’unanimité – mais objectivement, lequel en est capable ? – c’est Death Stranding. Ceux qui sauront accepter de sortir de leur zone de confort et de lâcher prise pourront l’apprécier de la meilleure manière possible et même parfois sourire devant quelques fugaces moments de légèreté.

« Un jour il y eut une explosion. »

 

Test réalisé par Midnailah sur une version fournie par Playstation France.

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